dimanche 24 mars 2013

GREEN SOFA DUNKERQUE : UN ECHEC SYMBOLIQUE

Green Sofa Dunkerque, c'est l'histoire d'une fermeture d'entreprise désespérément banale et pourtant terriblement symbolique, qui résume à elle seule tous les problèmes auxquels est confrontée l'industrie française.


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2010 : Propriété depuis plus de 20 ans du groupe Parisot, Green Sofa Dunkerque est rachetée par Jean-Charles Parisot, le cousin de Laurence, la patronne du MEDEF. Celui-ci rachète dans le même temps une société roumaine au bord de la faillite.

Septembre 2010 : Ikea, le seul client de Green Sofa, annonce son intention d'arrêter les commandes à la fin de l'année 2012. Les canapés de Dunkerque sont trop chers par rapport à ceux fabriqués dans les pays d'Europe de l'Est. Un choc pour une entité qui avait précisément décidé de se spécialiser afin de réduire les coûts.

2011 : Jean-Charles Parisot investit de manière considérable en Roumanie : des machines sont envoyées sur place et des dunkerquois partent former les ouvriers. L'entreprise moribonde devient florissante. Green Sofa Dunkerque connaît de son côté de grandes difficultés financières. Officiellement, aucun lien juridique ne relie les deux sociétés, mais les salariés comprennent très vite qu'ils sont victimes d'une délocalisation déguisée et s'organisent.

Février 2012 : En pleine campagne présidentielle, l'affaire prend une tournure politique. Les salariéstentent de se faire entendre et de médiatiser leur action, à l'instar des Lejaby ou des Florange. Sur son blog, Arnaud Montebourg dénonce les méthodes d'Ikéa et sa recherche effrénée du profit.

Mars 2012 : Jean-Charles Parisot assure qu'il ne veut pas fermer l'usine de Dunkerque. "Si je peux sauver les gens et ce bel outil, je le ferai", affirme-t-il au Phare Dunkerquois. "Je n'ai pas plus d'intérêt à partir en Roumanie". Quelques jours plus tard, l'entreprise est placée en redressement judiciaire.

Novembre 2012 : Après des mois d'incertitude et une proposition de reprise par le groupe Azur jugée insuffisante (qui se serait traduite, quoi qu'il arrive, par des suppressions massives d'emplois), l'entreprise est placée en liquidation judiciaire. 115 salariés sont laissés sur le carreau.

Décembre 2012 : Des mesures de reclassement sont proposées aux salariés. En Chine, en Indonésie, au Vietnam, à Hong Kong et... à Oradea, en Roumanie. La représentante du comité d'entreprise, Marie-Andrée Louchart révèle au Phare que le salaire proposé à Oradea était exactement de 382,33 € bruts par mois pour 40h de travail par semaine.

Janvier 2013 : Green Sofa Dunkerque n'existe plus.

Mars 2013 : Mobilis Industry rachète les machines de l'entreprise et loue ses anciens locaux. Une quinzaine d'employés seulement retrouve un travail sur place. Une situation temporaire, puisqu'il s'agit principalement d'honorer les commandes qui étaient en suspens après la mise en liquidation judiciaire de Green Sofa. Au-delà de ce délai, l'activité pourrait être transférée à Seclin.

Ainsi se termine l'un des plus désolants échecs industriels du département. Une affaire éclairante à plus d'un titre : elle témoigne d'abord de la naïveté confondante de nos élites, qui appellent tous à produire en France mais refusent de protéger notre industrie. Les salariés Français sont ainsi mis en concurrence avec des ouvriers payés une misère dans d'autres contrées et lancés dans une course sans fin au moins-disant social, qui encourage les délocalisations et ne sert que les intérêts du patronat, bien représenté ici par le cousin de l'actuelle dirigeante du MEDEF.

Elle est également la preuve que la protection de nos intérêts nationaux ne peut se réaliser dans le cadre actuel de l'Union Européenne : les traités, qui font l'apologie d'une prétendue "concurrence libre et non-faussée", interdisent aujourd'hui toute mesure de soutien ciblé et concret aux entreprises. Nos dirigeants actuels, quels qu'ils soient, sont pieds et poings liés et se retrouvent contraints de suivre une seule et même politique... qui s'avère désastreuse pour notre pays.

Pendant que la droite et la gauche assistent avec complaisance à l'explosion du chômage, Debout La République se doit de proposer une alternative, un autre chemin. Nous ne devons nous priver d'aucune arme pour faire face à la mondialisation sauvage. Voilà pourquoi nous voulons nous libérer du carcan que nous impose l'UE. C'est aussi pour cette raison que nous militons pour un protectionnisme intelligent face aux pays qui ne respectent pas nos normes sociales et environnementales, pour le démontage de l'euro qui pénalise nos exportations, pour la mise au pas du système financier et pour la baisse des charges pour les entreprises qui investissent en France.

Yohann Duval